Giulio Tosti : un organiste à la recherche d’expérimentations

giulio tosti

Dans le paysage musical, Giulio Tosti est un organiste atypique. Toulouse Magazine a rencontré ce musicien-explorateur afin d’évoquer son parcours, ses inspirations et sa vision contemporaine de l’orgue, un instrument qu’il souhaite libérer de ses contraintes culturelles et historiques.

Giulio Tosti : J’ai fait mes études au Conservatoire de Naples où j’ai suivi un parcours assez classique. Cet apprentissage m’a donné la force puis l’envie de dépasser le cadre académique pour développer une identité musicale qui m’est propre. J’ai donc créé deux projets en solo. Le premier, Nébula, a été conçu pour des orgues aux sons traditionnels, utilisant un clavier à pédalier avec une transmission mécanique. Pour le second projet, intitulé RUPESTRE, j’ai choisi d’utiliser des orgues pédagogiques en vue de créer des sonorités plus expérimentales. En parallèle de ces projets, je joue aussi au sein d’un quatuor appelé Tubi Nebulositrois compagnons saxophonistes m’accompagnent.

Giulio Tosti, d’où est née votre passion de l’orgue ?

Ce qui m’a attiré vers l’orgue, c’était l’impression de pouvoir jouer de tout un orchestre avec un seul instrument. L’orgue offre en effet une grande richesse en termes de timbres, de possibilités, de plans sonores et de variabilités. Plutôt que de diriger la musique à la baguette comme un chef d’orchestre, je voulais ressentir une vibration, une sensation tactile, celle que l’on ressent lorsque l’on joue de cet instrument.

Et puis, il faut reconnaitre que j’ai toujours eu une approche expérimentale de la musique. Dans cette perspective, j’aurais pu naturellement me tourner vers les synthétiseurs ou les claviers électroniques, mais j’ai décidé de rester fidèle à l’orgue et de trouver ma voie avec cet instrument, même s’il est souvent associé aux églises et à la musique sacrée.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

A vrai dire, elles varient selon les projets. Pour Rupestre, je m’inspire beaucoup des musiques du monde, en particulier celles des rituels soufis, de la musique indonésienne et même de la musique inuite. Ces vibrations musicales offrent une approche relativement brute des sons.

Les Pink Floyd et les groupes de rock progressif ont également exercé une grande influence sur moi, tout comme certaines musiques classiques modernes telles que le minimalisme de Philip Glass. Enfin, bien que je ne sois pas profondément ancré dans la musique électronique, certaines de ses idées et de ses concepts ont probablement aussi influencé ma façon de concevoir les flux musicaux.

Giulio Tosti, quelle est la place de l'orgue dans la musique contemporaine ?

L’orgue est un instrument surprenant tant il peut offrir de diversité et de sensibilité musicale. Malheureusement, il est trop souvent associé à la musique religieuse. Pourtant, ses possibilités d’expression sont nettement capables de sortir de ce carcan cultuel pour aller explorer tous les autres champs musicaux. C’est pourquoi, il est important de redonner à l’orgue une place dans le milieu contemporain qui selon moi propose une approche plus libre et plus informelle. D’ailleurs, il m’arrive assez souvent que des spectateurs viennent me voir à l’issue des concerts pour me dire combien ils ont été surpris des richesses musicales de cet instrument.

S’agissant de l’orgue, avez-vous remarqué des différences de perception entre la France et l'Italie ?

La différence est assez flagrante. En Italie, l’Église a une influence plutôt forte, ce qui restreint la vision de l’orgue au cadre religieux. En France, l’orgue est reconnu comme un instrument de musique à part entière et pas seulement comme un instrument liturgique. Vis-à-vis de l’orgue, la France a sensiblement plus de curiosité pour des approches artistiques non conventionnelles.

Giulio Tosti, quelle est la place de l'orgue dans la musique contemporaine ?

À l’instar des ateliers de percussions, j’aimerais monter un ensemble d’orgues pédagogiques afin d’ouvrir une porte d’accessibilité plus populaire à cet instrument. En parallèle, je souhaiterais promouvoir l’orgue dans le paysage musical afin qu’il soit plus visible, plus évident. Cela passerait évidemment par d’avantage de collaborations avec d’autres musiciens mais aussi par l’audace des programmateurs. J’ose espérer que l’orgue trouvera à l’avenir plus de place dans des festivals de musique contemporaine ou de de jazz, que des projets liés à l’orgue aient la chance de figurer dans leurs programmations.

Interview réalisée par Marie Aébi avec la complicité de Stéphane Reynier
Photographie de Clément Fumey
Remerciements à Toulouse les Orgues

Pour en savoir plus :
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